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Dans l'Allemagne provinciale des années 20, un vieux professeur de lycée, qui règne sur ses élèves en despote, se retrouve un jour dans un cabaret mal famé, L'ange bleu. Sa rencontre avec la chanteuse vedette, Lola Lola, bouleverse son existence routinière, et l'entraîne dans un tourbillon passionnel et destructeur...
Premier film parlant du cinéma allemand, L'ange bleu dresse le portrait poignant d'un homme victime de son propre désir, servi par une prestation hors-pair du "monstre sacré" Emil Jannings. Mais c'est avant tout la rencontre entre la flamboyance visuelle de Josef von Sternberg et la plastique provocante de Marlene Dietrich qui fait de L'ange bleu un des joyaux inestimables du 7ème art.
Issu d'une famille de la classe moyenne juive de Vienne, il a fait, contrairement à Erich von Stroheim, de solides études en Autriche et aux États-Unis, avant de travailler comme monteur pour une compagnie du New Jersey. Il est assistant de plusieurs metteurs en scène, puis un acteur de théâtre britannique, George K. Arthur, lui propose de le diriger dans un film qui doit marquer ses débuts à l'écran.
Sternberg accepte et lui soumet un scénario. Ce sera The Salvation Hunters qui surprend à l'époque par son côté naturaliste. Mary Pickford songe à Sternberg pour l'un de ses films, mais c'est finalement la Metro-Goldwyn-Mayer qui l'embauche. Les débuts de Sternberg ne sont pas très heureux : The Masked Bride et The Exquisite Sinner sont terminés ou refaits par d'autres. Le premier film est achevé par Christy Cabanne en 1925, et le second par Phil Rosen en 1926. Nouvel échec avec A Woman of the Sea, commandé par Charlie Chaplin pour Edna Purviance, et qui ne sera jamais montré. Cette série noire s'interrompt avec Les Nuits de Chicago, tourné pour la Paramount Pictures, d'après une histoire de Ben Hecht. Les Damnés de l'océan le classe parmi les grands maîtres du muet.
Sa carrière prend un nouveau tournant avec L'Ange bleu, tourné en 1930 pour l'UFA en Allemagne. Comme partenaire féminine d'Emil Jannings, il porte son choix sur Marlène Dietrich. Commence l'histoire de Pygmalion et Galatée. Dans ses souvenirs, Sternberg affirmera avoir créé de toutes pièces le mythe de Marlene et minimisera le rôle de son interprète qui protestera. « J'ai cessé de faire du cinéma en 1935 », déclarait Sternberg, faisant allusion à la fin du cycle Marlene. Cependant Shanghai Gesture en 1941 et surtout Fièvre sur Anatahan, tourné au Japon, prouvent le contraire, et ne peuvent que faire regretter qu'un sujet aussi ambitieux que I, Claudius n'ait jamais pu être terminé.
1925 The Salvation Hunters
1926 The Sea Gull / A Woman of the Sea (inédit)
1927 Underworld / Les nuits de Chicago
1928 The Last Command / Crépuscule de gloire
The Dragnet / La rafle
The Docks of New York / Les damnés de l'océan
1929 Thunderbolt / L'assommeur
The Case of Lena Smith / Le calvaire de Lena X
1930 Der blaue Engel / L'ange bleu
Morocco / Coeurs brûlés
1931 An American Tragedy / Une tragédie américaine
Dishonored / Agent X-27
1932 Blonde Venus / Blonde Vénus
Shanghai Express
1934 The Scarlet Empress / L'impératrice rouge
1935 The Devil is a Woman / La femme et le pantin
Crime and Punishment / Remords
1936 The King Steps Out / Sa Majesté est de sortie
1937 I, Claudius (inachevé)
1939 Sergeant Madden / Au service de la loi
1941 The Shanghai Gesture / Shanghai
1952 Macao / Le paradis des mauvais garçons
1953 The Saga of Anatahan / Fièvre sur Anatahan
1957 Jet Pilot / Les espions s'amusent (tourné en 1950)
Marlène Dietrich est une actrice et chanteuse allemande, naturalisée américaine à l'âge de 36 ans. Elle fût et reste non seulement une icône glamour des années 30, mais aussi un symbole anti-fasciste et l'incarnation d'une certaine liberté sexuelle. Elle fût aussi longtemps la muse du réalisateur Josef von Sternberg.
Marie Magdalene Dietrich est née en 1901 à Berlin-Schöneberg, et s'est éteinte le 6 mai 1992 à Paris en France.
Elle est la fille cadette d'un officier prussien et de Joséphine, née Felsing. Elle n'a que 7 ans lorsqu'elle perd son père, en 1908. À 11 ans, elle choisit de contracter ses deux prénoms -Marie Magdalene- en Marlène.
Dès 1921, elle prend ses premiers cours de théâtre auprès de Max Reinhardt, à Berlin. En 1922, elle joue ses premiers petits rôles au théâtre et dans des revues, aux côtés de la vedette française Margo Lion. En 1922, elle entre dans le petit monde du cinéma muet, et devient célèbre avec son personnage de femme fatale dans l'Ange bleu (Der Blaue Angel, 1930) de Jospeh Von Sternberg. La voix rauque et les jambes de Marlène en font du jour au lendemain non seulement une vedette internationales, mais encore un mythe cinématographique. Paramount se l'attache pour la lancer en rivale de Garbo, alors sous contrat à la MGM.
Elle tourne avec Sternberg six films extravagants, dans des décors que n'auraient renié ni Maerten Heemkerk ni Goya. Après l'échec de The Devil is a Woman, le couple Dietrich-Sternberg se sépare. Mais Marlène est trop marquée par le personnage de Lola pour pouvoir lui échapper. C'est ainsi que The Garden of Allah aurait pu être signé par Sternberg. Clair, Walsh et Garnett lui ont également offert des personnages tout à la gloire de son mythe. Pendant la guerre, Marlène Dietrich refuse de regagner l'Allemagne. Elle participe à la campagne anti-hitlérienne et vient assister les soldats sur le front. Son attitude lui vaudra la légion d'honneur. Ses derniers films, après 1948, sont dirigés par Lang, Hitchcock et Welles, preuve qu'elle demeure la star par excellence. Ses tours de chant à Londres, New York, Paris, las Vegas déchaînent l'enthousiasme. Installée à Paris après 1945, elle y meurt en 1992, devenue une véritable légende vivante
1922 Der Kleine Napoleon (Georg Jacoby)
1925 La rue sans joie (Georg Wilhelm Pabst)
1926 Manon Lescaut (Arthur Robinson)
1927 Café Electric (Gustav Ucicky)
1928 Princesse Olala (Robert Land)
1929 Ce n'est que votre main, Madame (Robert Land)
Le navire des hommes perdus (Maurice Tourneur)
Nuit d'amour (Fred Sauer)
1930 L'ange bleu (Josef von Sternberg)
Coeurs brûlés (Josef von Sternberg)
1931 Agent X-27 (Josef von Sternberg)
1932 Blonde Vénus (Josef von Sternberg)
Shanghai Express (Josef von Sternberg)
1933 Le cantique des cantiques (Rouben Mamoulian)
1934 L'impératrice rouge (Josef von Sternberg)
1935 La femme et le pantin (Josef von Sternberg)
1936 Désir (Frank Borzage)
Le jardin d'Allah (Richard Boleslavsky)
1937 Le chevalier sans armure (Jacques Feyder)
Ange (Ernst Lubitsch)
1939 Femme ou démon (George Marshall)
1940 La maison des sept péchés (Tay Garnett)
1941 La belle ensorceleuse (René Clair)
L'entraîneuse fatale (Raoul Walsh)
1942 Madame veut un bébé (Mitchell Leisen)
Les écumeurs (Ray Enright)
Pittsburgh (Lewis Seiler)
1944 Hollywood Parade (Edward Sutherland)
Kismet (William Dieterle)
1946 Martin Roumagnac (Georges Lacombe)
1947 Les anneaux d'or (Mitchell Leisen)
1948 La scandaleuse de Berlin (Billy Wilder)
1949 L'ange de la haine (Fletcher Markle)
1950 Le grand alibi (Alfred Hitchcock)
1951 Le voyage fantastique (Henry Koster)
1952 L'ange des maudits (Fritz Lang)
1956 Le tour du monde en 80 jours (Michael Anderson)
1956 Une histoire de Monte Carlo (Samuel Taylor)
1957 Témoin à charge (Billy Wilder)
1958 La soif du mal (Orson Welles)
1961 Jugement à Nuremberg (Stanley Kramer)
1964 Deux têtes folles (Richard Quine)
1979 Gigolo (David Hemmings)
L'Ange Bleu – La naissance d'un mythe
Symbole éternel d'une féminité destructrice et irrésistible, Marlene Dietrich restera à jamais associée à L'ange bleu, ainsi qu'à son génial Pygmalion, Josef von Sternberg, avec qui elle réalisera ses plus beaux films. C'est ce dernier qui, la découvrant sur une scène de théâtre en 1929, lui fait passer une audition et l'impose pour le rôle de Lola Lola, contre l'avis de la maison de production, la UFA, et de la star masculine du film, Emil Jannings. Le producteur Erich Pommer, qui a déjà à son actif les plus grands chefs-d'œuvre du cinéma allemand - Metropolis, Le dernier des hommes, Le cabinet du docteur Caligari - la trouve en effet trop vulgaire.
Marlene est pourtant issue d'une famille bourgeoise, composée de bijoutiers et de militaires, et son enfance est rythmée par la lecture de Goethe et la pratique du violon. Mais rapidement, la vie artistique et frénétique du Berlin des années 20 la détourne d'un destin trop prévisible. Attirée par les feux de la rampe, elle danse et chante dans les cabarets, avant d'apparaître au théâtre et au cinéma, côtoyant aussi bien Max Reinhardt que Leni Riefenstahl.
En 1929, Marlene a joué dans une quinzaine de films, se faisant un nom dans de nombreuses comédies romantiques. Mais rien de comparable avec L'ange bleu, premier film parlant du cinéma allemand, doté d'un budget de superproduction, avec une star internationale, Emil Jannings, qui empoche à lui seul 200 000 dollars - une somme exorbitante pour l'époque, qui suffirait à couvrir aux deux tiers le budget total de King Kong, et à côté de laquelle les 5 000 dollars de Marlene font pâle figure.
Auréolé d'une brillante carrière aux Etats Unis - où il a décroché le premier Oscar du meilleur acteur en 1927 - Emil Jannings sait que sa reconversion au parlant ne peut se faire que dans sa langue natale, l'allemand. Il fait venir à Berlin Josef von Sternberg, qui l'avait dirigé à Hollywood dans Crépuscule de gloire. D'origine autrichienne, Sternberg est indispensable pour diriger les deux versions du film - L'ange bleu sera en effet tourné simultanément en allemand et en anglais, la UFA cherchant à pénétrer alors le marché américain. A l'inverse de Dietrich, Sternberg vient d'un milieu pauvre et prolétaire, dont il s'est inspiré pour recréer avec un réalisme saisissant le monde de la pègre dans Les nuits de Chicago. L'énorme succès du film lui assure une grande liberté au sein de la Paramount, qui cherche alors une actrice pouvant rivaliser avec Greta Garbo, l'idole de la MGM.
Fasciné par Marlene Dietrich, avec qui il a tout de suite une liaison, Sternberg est persuadé d'avoir trouvé sa future star. Le tournage commence le 4 novembre 1929. Sternberg, fidèle à sa réputation de metteur en scène tyrannique et maniaque, est attentif au moindre détail : décors, costumes, lumière, cadre, rien ne se décide sans son accord, et il peut refaire jouer 200 fois une prise pour atteindre la perfection. Rapidement, le personnage joué par Marlene prend une importance considérable, au grand dam d'Emil Jannings qui sent le film lui échapper. Son ressentiment envers Marlene est tel qu'il manque de l'étrangler pour de bon dans l'une des scènes du film. Mais rien n'y fait, et la mise en scène flamboyante de Sternberg transforme la jeune actrice en icône érotique et fantasmatique, qui assurera à Marlene une renommée internationale immédiate.
Mais ni la UFA ni même Dietrich ne sentent le vent venir. Seul Sternberg paraît assuré du succès de L'ange bleu. Avant que quiconque n'ait encore vu le film, il convainc la Paramount d'engager Marlene. Celle-ci fait sa valise le soir même de la première, le 30 mars 1930. Elle quitte la salle sous un tonnerre d'applaudissements, avec dans la main un billet pour l'Amérique.
Là bas, elle retrouvera Sternberg qui la dirigera dans six autres films, instaurant une telle relation amoureuse entre l'actrice et la caméra qu'il considérera avoir "cessé de faire du cinéma en 1935", année de son dernier film avec Marlene. Il aura entre-temps créé un des mythes les plus envoûtants de l'histoire du cinéma, un mythe qui, comme Lola Lola, "de la tête aux pieds, est fait pour l'amour".
Les acteurs
Emil Jannings | Professeur Immanuel Rath |
Marlene Dietrich | Lola-Lola |
Kurt Gerron | Kiepert, le Magicien |
Rosa Valetti | Guste, sa femme |
Hans Albers | Mazeppa |
Charles Puffy | Le propriétaire de l'Ange bleu |
Eduard von Winterstein | le directeur du lycée |
Réalisation | Josef von Sternberg |
Production | Erich Pommer |
Scénario | Josef von Sternberg, Carl Zuckmayer, Karl Vollmöller, Robert Liebmann et Heinrich Mann, d'après son roman Professor Unrat. |
Musique | Friedrich Hollaender |
Photographie | Günther Rittau et Hans Schneeberger |
Montage | Sam Winston |
Direction artistique | Otto Hunte |
Distribution | Films Sans Frontières |